Internaute,
hier en attendant que Mignonman finisse diligemment de préparer notre repas de midi, j’ai pris un air très affairé, je me suis ostensiblement tournée vers la télévision, et j’ai zappé sur Canard plus pour me donner une contenance. C’est là que je me suis retrouvée happée par un trou de ver spatiotemporel qui m’a propulsée toute incrédule dans les années 90 que je croyais révolues à jamais. En effet Internaute, en cette période de nuit debout, crise migratoire, désastre écologique, sur fond de panama papers saupoudré de gouvernement au 49-3 nous avions droit à un « sexy demain » indispensable, en prise totale avec le ras le bol citoyen, le besoin de renouveau éthique, politique et institutionnel, attention j’ai nommé: la spéciale Alain Juppé. Je te la fais rapide: deux heures de chauve qui luit sous les projecteurs en te donnant ses propositions pour relancer la France dès la présidentielle de 2017 -ou alors peut être plus pour reprendre encore un tour de manège dans la grande foire du capitalisme sauvage, je te laisse voir.
J’ai eu beau tendre l’oreille à l’affût du moindre frémissement d’idée, je n’ai entendu que des platitudes qui tournent en boucle chez tous les politiques depuis ma naissance: les charges patronales trop hautes, les citoyens des « quartiers » qu’en ont marre et on les comprend, la croissance qui doit croître, le chômage qu’est méchant, et ce type qui sent le rance et le formol de se pointer avec sa tronche de messie déplumé qui en a vécu d’autres, pour nous proposer de continuer toujours pareil avec nos amies les banques et les multinationales, alors que c’est juste un repris de justice condamné dans une affaire d’emplois fictifs. De sa tribune de vide chez Bolloré, on retient qu’il a la prétention de se faire élire par nous, Internaute, et on devine qu’il espère juste que ses concurrents seront aussi pleins de vent que lui et qu’il pourra jouer son combo papy bourge rassurant + abstention massive des aspirants à autre chose+ Alzheimer des électeurs qui restent pour ratisser large décrocher la timbale. Au moins, il fait pas semblant de vouloir une autre société, et le pire, c’est que ça peut carrément marcher.
J’en étais à me dire qu’on avait vraiment touché le fond du trou du cul de l’immobilisme lorsque soudain Ali Badibadou -qui était quand même vachement mieux employé à la nouvelle édition que dans ce format lèche-cul hebdo, a mis sur le tapis le sujet de la femme d’Alain Juppé (Aline Juppette? Non, Isabelle, journaliste de son état, pardon pour cette blague). Et c’est là, sur ce sujet un peu perso sur lequel on ne lui avait rien demandé, que Juppé a jugé malin de planter le clou de son spectacle qui sent bon la naphtaline et le col de chemise amidonné:
« ses principales qualités sont la discrétion et la pudeur, des qualités rares par les temps qui courent ».
Voilà. Discrète et pudique, ce sont en effet de grandes qualités pour se faire respecter et considérer dans notre belle société sexiste, où les femmes sont reléguées au CDD, au temps partiel, avec des fiches de paye au régime. C’est discrètement et pudiquement, dans le calme feutré de notre salon Roche Bobo, ou bien envuitonnée dans notre trench et le petit doigt sur la couture du pantalon Chanul, qu’on doit demander une augmentation à notre boss, rembarrer le pervers qui nous pelote dans le RER, élever nos enfants, et embaucher du personnel pour gérer le ménage que les hommes ne font toujours pas, parce que toutes ces hystéros qui pètent un câble au moindre petit claquage d’élastique de culotte, et beuglent en jogging avec un bébé plein de vomi sur le bras que le frigo est vide et la vaisselle pas faite, ça commence à empêcher ces messieurs d’oeuvrer au salut de la France. D’ailleurs Molière le disait bien:
« Oui, je tiens que jamais, de tous ces vains propos,
On ne doit d’un mari traverser le repos. » (Tartuffe, 1664)
Sur ce, Internaute, je retourne discrètement au lavoir essorer mes jupons, et je te souhaite de bonnes primaires à droite.
Tout cela pendant que monsieur prépare le repas dans la cuisine, vautrée devant la télévision à regarder Alain Juppé. Avec une bière à la main ou avec un mojito-hyène de garde avec une olive? Sinon, la seule personne qui siège au parlement avec un bracelet électronique, est une femme….
« La dé pute est l’avenir de l’homme » Caroline Fourest, Obersturmführer, féminazie aussi
Maintenant on a le choix entre une majorité de mecs dont le nom se termine par « on » plus une femme dont le nom se termine par « haine »… on n’arrête pas le progrès!